Le tramway «plus efficace et plus économique» pour Gatineau, conclut la STO
Par Mathieu Bélanger, Le Droit
6 septembre 2023
Si Gatineau souhaite répondre aux besoins grandissants de mobilité dans l’ouest de la ville pour les 30 à 50 prochaines années, le tramway s’avère le projet le plus efficace et le plus économique, conclut une nouvelle étude rendue publique, mercredi matin, par la Société de transport de l’Outaouais (STO).
Le rapport final de l’Étude complémentaire pour la réalisation d’un système de transport structurant, dont la publication était retardée depuis près d’un an, est maintenant disponible à toute la population. Cela permet en même temps à la STO de déployer toute sa campagne d’information en lien avec cette importante étape sur le site
www.tramwaygatineauottawa.ca.
«Enfin, on peut donner le rapport final de nos études », a lancé, enthousiaste, le président de la STO, Jocelyn Blondin, au terme d’un long breffage technique avec les médias. « La synthèse démontre clairement les besoins pour un tramway. Les chiffres le démontrent », a-t-il ajouté. La recherche compare ce qu’il faudrait en autobus pour desservir l’ouest de l’agglomération, de 2031 à 2051, et conclut que le tramway est l’option la plus économique à long terme pour la Ville de Gatineau. « Oui ça ferait augmenter les dépenses, a dit M. Blondin, mais elles devraient augmenter de toute façon. Elles augmenteront moins avec un tramway qu’avec un système rapide sur bus (SRB).»
Le débat sur le mode de transport à privilégier a donc une conclusion: un projet tout tramway abat toute compétition. S’amorcera maintenant le débat sur les coûts. En ce sens, bien des yeux se tourneront vers la Ville de Québec qui doit bientôt présenter une révision de la facture totale de son propre projet de tramway.
Évidemment, les coûts de construction d’un tramway comme celui de Gatineau qui s’étend sur 24 km, qui comprend 36 stations et qui traverse à Ottawa par le pont du Portage sont appelés à augmenter substantiellement.
L’estimation de 2021 faite par la STO varie entre 3,4 et 4,4 milliards de dollars, selon que le tramway s’arrime dans un tunnel ou en surface à Ottawa. Ce chiffre est déjà caduc depuis longtemps. Le gouvernement du Québec a d’ailleurs demandé une mise à jour des coûts de tous ses grands chantiers d’infrastructures, dont le tramway de Gatineau. Le gouvernement se dit toutefois toujours derrière le projet de Gatineau.
«Mais la construction du tramway est un investissement entièrement fédéral et provincial, ce n’est pas un investissement municipal, ça ne coûtera rien à la Ville », a insisté M. Blondin. « Si cet investissement n’est pas fait ici chez nous, il sera fait ailleurs, dans une autre ville, et ce seront les mêmes contribuables qui paieront la facture. Alors, profitons-en. On dit toujours que la région est oubliée. Il faut investir cet argent ici.»
Si l’aménagement du tramway est payé à 100% par les gouvernements supérieurs, la facture de l’exploitation du tramway revient toutefois à la Ville de Gatineau. Les contribuables gatinois paient déjà 75 millions par année en quote-part à la STO et la facture augmente chaque année.
Coûts d’exploitation
Pour la première fois dans le cadre de l’étude complémentaire, la STO a rendu publique une estimation des coûts d’exploitation des différentes options qu’elle a étudiées. Ainsi, exploiter un tramway transportant entre 50 000 et 60 000 passagers par jour, dont 6000 dans la seule heure de pointe du matin, coûterait 34,5 millions par année.
Cette estimation comprend les coûts pour les chauffeurs, l’entretien des véhicules, le carburant ou l’énergie et une série d’autres éléments qui ont été caviardés dans le rapport remis aux médias. En comparaison, l’exploitation d’un SRB dans l’ouest coûterait 36,2 millions par année. Il faut cependant ajouter au tramway une dépense annuelle de 16,4 millions en entretien du réseau mineur et majeur.
On ne retrouve cependant pas l’équivalent en entretien du réseau pour un SRB dans le rapport. La raison est simple, a indiqué la STO; un SRB n’arriverait tout simplement pas à desservir l’ouest à long terme. Il n’est pas une option.
Les deux systèmes n’offrent pas la même capacité. Une voiture de tramway peut transporter 300 personnes à la fois. Dans le Rapibus, c’est 90 personnes par véhicule. Pour être aussi efficace qu’un tramway qui passe aux trois minutes en heure de pointe, il faudrait un autobus chaque minute, a imagé le nouveau directeur du bureau de projet du tramway, Jean-François Mahé, en rencontre technique avec les médias. C’est trois fois plus d’autobus et trois fois plus de chauffeurs.
Travaux municipaux plus économiques
Les raisons pour Gatineau de privilégier un tramway ne s’arrêtent pas là , souligne M. Blondin. Les coûts de construction du tramway assumés par les gouvernements supérieurs comprennent aussi les dépenses nécessaires à déplacer, réaménager et changer une multitude d’infrastructures municipales comme des conduites d’eau et d’égout, des trottoirs, des pistes cyclables et autres aménagements urbains, précise la STO.
«La Ville n’aurait à payer une partie des travaux que si elle souhaite augmenter la capacité de certaines infrastructures », a noté M. Blondin. « Ça reste une fraction du prix si tout le reste est financé à même les travaux du tramway. La Ville doit profiter de cette occasion. Ça représente d’énormes économies pour la Ville. Ce sont des sommes qu’on pourrait réutiliser ailleurs, pour d’autres rues.» Cependant, cela forcerait aussi la Ville à investir temps et énergie dans des remplacements d’infrastructures encore relativement récentes, comme dans le Plateau, par exemple. Des travaux qui pourraient ne pas être dans sa planification pour l’instant.
Pandémie
Un tableau représentant l’impact de la pandémie sur la mobilité et la clientèle des transporteurs publics a aussi été présenté aux médias. Une modélisation prenant en considération une réduction de 25% de la clientèle par rapport à ce qui était estimé avec des données prépandémiques n’a pas raison du tramway. Un SRB serait quand même déjà dépassé le jour de son lancement, sinon très rapidement, soutient la STO. Pour éviter que le tramway se retrouve en surcapacité, donc avec des véhicules pas suffisamment utilisés, la fréquence des passages serait prolongée à quatre minutes au lieu de trois.
Débat éclairé
Tant pour la haute direction de la STO que pour le Bureau de projet du tramway, le soulagement provoqué par la publication de ce rapport final était évident, mercredi matin. «On est sur les blocs de départ, on est prêt à partir, a insisté le directeur général de la STO, Patrick Leclerc. Ces informations permettront un débat éclairé dans la population, c’est important. L’acceptabilité sociale dans ce type de grand projet c’est la base et la base est d’avoir de l’information claire, transparente et accessible. C’est ce qu’on donne aujourd’hui.»
https://www.ledroit.com/actualites/a...0de%20Gatineau.